Nous sommes impuissants…
Le monde ne parvient pas à faire face à un effondrement catastrophique de la biodiversité qui menace non seulement d’anéantir des milliers d’espèces mais met également en danger l’approvisionnement alimentaire, la santé et la sécurité de l’humanité. Pourtant, lorsque les gouvernements agissent pour protéger et restaurer la nature, cela produit bien souvent des résultats. Mais malgré les engagements pris il y a 10 ans, les nations sont loin de faire face à l’ampleur de la crise, qui continue de s’aggraver en raison de l’agriculture non durable, de la surpêche, de la combustion de combustibles fossiles et d’autres activités nuisibles pour notre environnement. Nous nous trouvons maintenant à la croisée des chemins et les choses ne feront qu’empirer si nous ne changeons pas immédiatement de cap.
Peut mieux faire !
En 2010, à l’issue d’un travail scientifique minutieux et de négociations serrées, presque tous les pays du monde avaient signé une convention sur la biodiversité afin d’endiguer l’hémorragie de la biodiversité. Cette convention comprenait 20 objectifs contraignants mais atteignables. À l’époque, la science était déjà très claire : l’activité humaine décimait les animaux et les plantes à travers la planète, provoquant une vague d’extinctions massive et déséquilibrant tellement les écosystèmes que les effets domino menaçaient les humains eux-mêmes. L’accord, avec une échéance de 2020 pour les nouveaux objectifs, était plein d’ambition. Mais, malheureusement, le rapport de la Convention sur la diversité biologique (Perspectives mondiales de la diversité biologique 5) qui évalue les progrès sur ces 20 objectifs, a constaté que certains progrès avaient été réalisés mais qu’ils n’étaient pas suffisants.
Un manque de volonté politique
Comme pour le changement climatique, les alertes des scientifiques sur la perte de biodiversité sont restées largement ignorées à mesure que le problème s’intensifiait. L’activité humaine a si radicalement remodelé le monde naturel qu’un million d’espèces d’animaux et de plantes est menacé d’extinction (les populations de près de 4 400 mammifères, oiseaux, reptiles, amphibiens et poissons surveillés ont diminué de 68 % depuis 1970). Au niveau mondial, seuls six des 20 objectifs de la convention sur la biodiversité ont été partiellement atteints et aucun n’a été pleinement atteint.
La destruction d’habitats tels que les forêts, les mangroves et les prairies n’a pas été réduite de moitié comme le prévoyait un des objectifs. La surpêche n’a pas diminué non plus. Pire, les gouvernements n’ont jamais cessé de subventionner les combustibles fossiles, les engrais et les pesticides qui contribuent à la crise de cette biodiversité. Ces gouvernements dépensent près de 450 milliards d’euros par an pour des initiatives nuisibles à l’environnement, tandis que le financement public et privé total pour la biodiversité ne représente que 80 milliards d’euros. Les dirigeants nationaux qui disent comprendre la crise ont décidemment beaucoup de mal à résister aux lobbies, aux intérêts à court terme et à leur désir de réélection. Sur 196 pays, 167 ont soumis des rapports nationaux sur leurs efforts. Les États-Unis ne l’ont pas fait, car ils n’étaient pas partie prenante du traité.
Le plus grand facteur de perte de biodiversité terrestre est la destruction et la dégradation de l’habitat, principalement à cause de l’agriculture. En mer, le plus gros problème est la surpêche. Le changement climatique jouera un rôle croissant à mesure que ses effets s’intensifieront au cours des prochaines années. Et les crises jumelles du changement climatique et de la perte de biodiversité sont inextricablement liées. Par exemple, puisque les arbres absorbent et aident à stocker le carbone, le défrichement des forêts intensifie le changement climatique, tandis que leur restauration contribue à l’atténuer.
Des raisons d’espérer
Malgré l’échec global, le rapport met en évidence les domaines de progrès dans le monde. Les efforts de conservation ont empêché environ 11 à 25 extinctions d’oiseaux et de mammifères au cours de la dernière décennie. Les « histoires de réussite », petites et grandes existent et peuvent servir de modèle. Ainsi, 20 millions d’agriculteurs chinois ont réduit la quantité d’azote qu’ils utilisaient sur des cultures comme le riz et le blé tout en augmentant simultanément les rendements. L’Indonésie, le Libéria et la Gambie ont réprimé les navires de pêche étrangers illégaux, améliorant leurs stocks de poissons au profit des pêcheurs locaux. Le Guatemala a récompensé les propriétaires fonciers qui ont restauré les forêts avec des espèces indigènes…
Mais ces actions doivent considérablement s’intensifier. L’ampleur de la crise et le grand nombre d’humains vivant sur la planète signifient que la conservation seule ne suffira pas. Les sociétés modernes devront transformer leur façon de produire et de consommer de la nourriture et d’autres biens avec un soucis permanent de durabilité. Nos modèles économiques sont obsolètes, ils ignorent complètement le bien-être humain.
Sans changement transformationnel, toute l’humanité paiera l’addition cash…pensons à nos enfants.